La nouvelle est tombée ce vendredi 3 avril pour 740 000 lycéens des filières générales, technologiques et professionnelles qui passent le bac cette année. L’examen est amputé de ses épreuves finales et son obtention dépendra des notes du contrôle continu, comme l’a annoncé Jean-Michel Blanquer lors de sa conférence de presse. Une décision qu’espéraient bon nombre de syndicats et d’associations de professionnels pour répondre à une situation exceptionnelle liée au Covid-19. Pour Christine Guimonnet, secrétaire générale de l’association des professeurs d’histoire-géographie (APHG) et elle-même professeure pour des Terminales, cette nouvelle n’est pas vraiment une surprise. « On peut difficilement faire autrement. Comment organiser ces épreuves alors que les établissements sont fermés, que nous n’avons aucune certitude sur le déconfinement et le retour en cours ? Le baccalauréat est une machine lourde. Faire un examen en temps limité, à distance, pour tous les candidats sur une même journée aurait été impossible. C’est un pis-aller », analyse la professeure.
Réduire des inégalités
Le fait de tenir compte uniquement du contrôle continu est aussi une manière de limiter les inégalités creusées par le confinement ; certains lycéens ont par exemple des difficultés pour se connecter aux environnements numériques de travail (ENT). Par ailleurs, il est plus difficile pour les enseignants de cerner les difficultés de chacun et d’essayer de les aider. « Avec déjà bientôt quatre semaines sans cours en classe, c’est compliqué d’évaluer les avancées de chacun. Il y a eu un gros travail de fait pour la continuité pédagogique mais ça ne vaut pas des cours en présentiel », déclare Sébastien Planchenault, président de l’association des professeurs de maths (APMEP). Et si certains lui ont confié avoir l’impression d’avoir un peu travaillé pour rien en consacrant des cours à la méthodologie de l’examen, il assure que ça sera toujours utile pour les études supérieures.
Du côté des élèves, d’autres craintes sont nées. Sur Twitter, certains expliquent être plus sévèrement notés dans leur lycée pour justement être mieux préparés au bac ! Résultat : leurs modestes notes en contrôle continu ne reflètent pas leur niveau. Un déséquilibre qui devrait être gommé par le jury d’harmonisation. Celui-ci examinera, en effet, les livrets scolaires des lycéens et tiendra compte des différences de notation de certains établissements. Reste à savoir comment…
Le travail de l’année valorisé
Pour Christine Guimonnet, les conditions d’un examen national sont une garantie d’équité, même si chaque professeur connaît bien ses élèves, qu’il évalue régulièrement afin de vérifier l’assimilation des savoirs et des méthodes. Et tous les ans elle le constate : « En général, ceux qui travaillent tout au long de l’année ont de bons résultats au bac. Cet examen n’est pas un sprint mais une course de fond », assure-t-elle. Les déconvenues concernent davantage ceux dont la moyenne annuelle est faible. « Certains élèves pour des raisons personnelles ont pu avoir des difficultés cette année et flancher les deux premiers trimestres. On aurait voulu avoir en plus du contrôle continu une ou deux épreuves début septembre pour permettre à chacun de se rattraper ou d’avoir une meilleure mention. On en connait déjà qui ne l’auront pas… Les épreuves finales permettaient souvent de gagner des points », glisse Floriane Gouget, secrétaire générale du Mouvement National Lycéen. Pour autant, elle reconnaît que le maintien des rattrapages est déjà une bonne chose et espère la bienveillance du jury d’examen. En dessous de 8 de moyenne, certains candidats pourront en effet retenter leur chance lors de la session de septembre. « Nous espérons pour ceux qui ont entre 8 et 10 de moyenne que les oraux de rattrapage pourront avoir lieu. C’est la dernière année du bac sous cette forme. Les élèves ne savent pas trop ce qui se passera pour eux s’ils ratent l’examen ; la pression est double », reconnaît Sébastien Planchenault.
Un vrai soulagement
Mais pour la plupart des lycéens et leurs parents, cette décision est synonyme de soulagement. « Après le confinement et les cours appris seule, ça m’aurait encore davantage stressée de devoir passer les épreuves. J’ai fait ma moyenne comme mes camarades, et normalement toute ma classe a le bac. C’est plus pour les mentions qu’il y a encore un doute », confie Emilie, en Terminale STD2A (sciences et technologies du design et des arts appliqués) à Paris. Quelques incertitudes persistent encore. « Je devais avoir un oral sur un projet personnel de 75h, je ne sais pas s’il sera maintenu. J’ignore aussi comment sera évaluée notre assiduité», ajoute-t-elle. Mais pas de quoi inquiéter la jeune fille et ses proches. « Sa moyenne est aux alentours de 12 et elle fait le travail demandé. Ses enseignants gardent le contact avec la classe et il y a un bon soutien. Ca me rassure », confie ainsi Claire, sa maman. Même son de cloche pour Ilona, en Terminale S dans les Deux-Sèvres. « J’étais bien contente de cette annonce car j’angoisse facilement. Ca y est, là je me dis que c’est bon pour le bac. Il faut juste continuer d’être assidue et ça ira ».
Evaluer l’assiduité
La question de l’assiduité reste de mise pour les élèves et les parents. « Le proviseur n’a pas plus de réponse à nous donner en-dehors de que ce qu’a dit le ministre. Il ne peut pas trop s’avancer, c’est normal. Mais j’imagine qu’ils vont tenir compte des connexions des élèves, des devoirs rendus, des efforts fournis… Je pense que les profs seront assez conciliants car c’est déjà compliqué d’envisager des redoublements avec la refonte du bac », suppose Elodie, la maman d’Ilona. Pour maintenir un espace de travail, conserver une cohésion et rassurer ses élèves, Christine Guimonnet, elle, varie les types d’exercices et garde le contact avec eux tous les jours par mail, sur les réseaux sociaux, au téléphone ou bien encore lors de visioconférences. De quoi entretenir un lien précieux.
Ilona et Emilie attendent désormais, comme bon nombre de lycéens, les résultats de Parcoursup ou les oraux des écoles pour déjà se projeter sur leur prochaine rentrée.
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