Quelle est actuellement la situation en STAPS ?
En 10 ans, en France, la filière Staps (sciences et techniques des activités physiques et sportives) a doublé ses effectifs d’étudiants créant de très vives tensions sur le personnel administratif et sur les enseignants. Cette augmentation continue d’étudiants n’a malheureusement pas été accompagnée de moyens suffisants. À Rennes 2, la situation en Staps est très pesante. Nous fonctionnons de manière dégradée : certaines filières n’ont toujours pas de responsables, de nombreux cours ne sont pas assurés, les infrastructures détériorées et les étudiants de plus en plus nombreux… Dans mon URF, nous sommes passés en 10 ans de 1500 étudiants à 2700 et le nombre de postes d’enseignants a très peu augmenté de 56 enseignants à 60 aujourd’hui.
Comment avez-vous obtenu ces 4 postes supplémentaires ?
Une première alerte a été lancée en 2017. Elle a débouché sur une grande concertation autour des Staps donnant lieu à un rapport du recteur mettant en avant la nécessité d’un plan d’urgence pour notre filière. Mais le ministère ne s’est pas du tout engagé dans cette voie… Ne voyant rien arriver, nous avons décidé de faire grève deux semaines en 2018. Résultat : nous avons obtenu 4 postes supplémentaires mais conditionnés à l’augmentation de nos capacités d’accueil en 1ère année. Un poste accordé permettait l’ouverture de 30 places supplémentaires sur Parcoursup. Pour les 4 postes, nous avons donc accueilli 120 étudiants de plus, mais cela a aggravé la situation. À Rennes 2, nous sommes l’un des plus importants UFR Staps de France mais nous avons un taux d’encadrement très mauvais : 1 enseignant pour 44 étudiants. Au niveau national, en Staps, la moyenne est de 1 enseignant pour 37 étudiants tandis que dans l’enseignement supérieur, elle se situe à 1 enseignant pour 18 étudiants.
La licence de STAPS est la troisième filière la plus demandée sur Parcoursup. Où en est-on des places accordées aux élèves et les débouchés sont-ils nombreux ?
Dans notre situation actuelle, nous n’arrivons pas à faire face… C’est pourquoi nous avions demandé un plan d’urgence pour investir de manière massive dans la filière Staps afin d’absorber cette surcharge d’élèves. Tous les étudiants ont le droit de poursuivre les études de leurs choix. La filière Staps est très demandée mais l’offre est réduite. Aujourd’hui, nous n’arrivons à prendre qu’un étudiant sur dix, ce qui n’est pas suffisant. Concernant les débouchés, ils sont très variés. Historiquement, la filière Staps formait uniquement des professeurs d’EPS. Dorénavant, les possibilités sont plus larges : nous formons par exemple à des métiers de la santé, de l’ergonomie, de l’entraînement ou encore du management du sport. Les métiers et profils des étudiants se sont démultipliés mais sans que cela ne soit accompagné d’un suivi en terme de personnels…
Quelles actions menez-vous aujourd’hui pour manifester votre mécontentement ?
En mai dernier, la médecine du travail a alerté la présidente de l’Université de l’épuisement des personnels suite à du surmenage et à des conditions de travail difficiles. Face à cette situation, nous avons décidé de suspendre nos responsabilités pédagogiques jusqu’à que nous obtenions une amélioration de nos conditions de travail. Nous avons donc prévenu l’université, le recteur ainsi que le ministère via un courrier. Il précisait que si des solutions satisfaisantes n’étaient pas trouvées pour la filière Staps nous n’organiserions pas la rentrée scolaire de septembre. L’été est passé sans que rien ne nous soit proposé. Nous avons donc décidé de poursuivre notre action et la rentrée à Rennes 2 s’est donc effectuée en décalage. Mi-septembre, nous avons organisé une manifestation jusqu’au rectorat qui a rassemblé près de 500 personnes dont de nombreux étudiants. Malgré une rencontre fin septembre avec le recteur, rien n’a changé… Il devait nous adresser des réponses concrètes au 15 octobre mais nous sommes toujours dans l’attente.
La seule chose que nous ayons obtenue est une aide de l’université de Rennes 2. Nous avons eu deux postes temporaires mais les recrutements ne sont pas encore actés, dont un poste qui devrait normalement se convertir en titulaire.
Vous êtes aussi très présents sur les réseaux sociaux, notamment via votre Twitter « Staps Rennes en colère ».
Effectivement, à travers notre compte Twitter, nous mettons en avant les difficultés de notre quotidien que nous cachions par le passé : pas d’accès aux gymnases pendant plusieurs semaines, des cours d’athlétisme dans la cour de récréation de l’URF par manque de pistes d’athlétisme…
En Staps, nous avons besoin d’avoir des équipements sportifs à proximité de l’établissement pour qu’il y ait des cohérences entre les cours théorique en salle et les cours en extérieur sur site. À Rennes, comme dans beaucoup d’autres universités, nous avons un gros déficit d’ infrastructures. C’est extrêmement compliqué de construire des emplois du temps lorsque nous avons des équipements à l’autre bout de la ville, des équipements où nous ne sommes pas prioritaires ou des équipements dégradés voire inexistants…
Votre mobilisation locale a-t-elle donné une impulsion nationale ?
Bien que l’Anestaps, l’association des étudiants de Staps, se mobilisait déjà via une opération intitulée #StapsOubliés, notre mouvement a effectivement abouti à une revendication nationale. Le jour où nous avons reçu le recteur, nous avons eu un soutien de tous les Staps de France. Tous se sont arrêtés pour marquer un moment symbolique et ont organisé des actions dans leur établissement. Notre mobilisation a été l’élément déclencheur et une réelle prise de conscience d’autres URF Staps de France, comme à Toulouse ou Bobigny par exemple, qui sont désormais aujourd’hui mobilisées. Une journée de mobilisation nationale, organisée par l’Anestaps, a eu lieu le 13 octobre dernier pour dénoncer le peu de moyens alloués à cette formation. Cette manifestation a, entre autres, été le point de départ d’une coordination nationale de nos actions afin que nous arrivions davantage à nous faire entendre !
Concrètement que demandez-vous à la ministre de l’Enseignement supérieur ?
Au niveau de Rennes 2, nous demandons prioritairement un plan de rattrapage avec la création au minimum de 14 postes de titulaires. Ces nouveaux postes nous permettraient de revenir à un fonctionnement plus ou moins normal de la filière et d’offrir aux étudiants des formations de qualité, équivalentes à celles qu’elles étaient il y a une dizaine d’années.
Idéalement, nous souhaiterions aussi un plan d’investissement plus large sur des nouveaux locaux et équipements sportifs. La filière Staps a besoin de moyens !
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