Lancé en juin 2023 par l’ancien ministre de l’Education nationale Pap Ndiaye et publié le 30 janvier dernier, le projet de nouveau programme d’EMC ne fait décidément pas l’unanimité. L’Association des professeurs de philosophie de l’enseignement public (APPEP) a adressé le 6 février 2024 une lettre aux co-pilotes du groupe d’élaboration des nouveaux programmes de terminale, afin de réclamer davantage de renvois vers les notions abordées en philosophie.
« L’EMC reste la chasse gardée de l’histoire-géographie »
L’association salue l’intitulé général du programme de terminale et « l’invitation faite aux élèves à s’interroger sur la façon dont ‘les citoyens s’informent et échangent, pour élaborer une véritable éthique de la discussion’ », ce à quoi la philosophie se prête particulièrement. Elle se satisfait également du lien entre la notion de « légitimité » proposée dans le projet de programme d’EMC et le programme de philosophie de terminale.
Cependant, elle déplore qu’il n’y ait pas davantage de passerelles établies entre les deux disciplines. Par exemple, elle suggère d’établir un lien entre la notion de « Constitution » étudiée dans le projet de programme d’EMC avec celle de « justice » du programme de terminale générale et technologique en philosophie, ou encore entre la notion de « citoyenneté active » et celles de « liberté » ou d’« Etat ».
Pour l’APPEP en effet, « dans beaucoup d’établissements, même en terminale, l’EMC reste la chasse gardée de l’histoire-géographie », privant les élèves d’une approche philosophique de la discipline. Etablir davantage de liens entre les deux matières permettrait aux enseignants de philo souhaitant prendre en charge cet enseignement de « trouver dans le programme un point d’appui pour faire reconnaître leur légitimité auprès de leur chef d’établissement et de leurs collègues ».
Elle demande donc au groupe d’enrichir le projet de programme d’EMC avec les renvois au programme de philosophie qu’elle propose.
Un « réarmement civique » promis par Emmanuel Macron
Ces nouveaux programmes d’EMC font partie du plan de « réarmement civique » dans l’éducation, annoncé le 16 janvier dernier par le Président Emmanuel Macron lors d’une conférence de presse. L’une des mesures de ce plan consistait en effet en « une instruction civique refondée » à l’école, impliquant un volume horaire doublé, ainsi qu’une heure par semaine dès la classe de 5e, « avec en appui les textes fondateurs de la Nation ».
Publiés le 30 janvier, ils avaient reçus un accueil mitigé auprès des enseignants, qui s’inquiétaient de sa densité en l’absence d’heures supplémentaires sur les dotations. Les Clionautes, association d’enseignants, d’historiens et de géographes, avait quant à elle estimé qu’il s’agissait d’une « simple réédition des précédents programmes d’Éducation morale et civique ». Elle avait également dénoncé « une écriture nettement plus prescriptive » et « quelques situations d’apprentissage aberrantes ».
Très intéressante information. Il n’est pas dans l’intérêt des élèves d’être privés d’une approche philosophique de l’EMC. Le ministère reconduit d’année en année un mensonge institutionnel: il fait croire que l’EMC peut être attribué aux philosophes et, dans les faits, laisse les historiens confisquer et dénaturer cet enseignement. En matière d’exemplarité éducative, morale et civique, on a vu mieux…Et qu’ont à gagner les historiens-géographes, pour leur crédibilité intellectuelle, à passer pour omniscients?
Chers collègues, les heures d’EMC sont bien souvent utilisées comme variables d’ajustement afin de produire des Temps plein ou des Heures supplémentaires pour nos collègues d’Histoire-geographie;ces heures permettent également dans les classes à examen, de finir le programme. Il existe donc un phénomène « chasse gardée « de ces heures pour un certain nombre de collègues d’Histoire- géographie ; elles servent de réserves et ils s’en considèrent propriétaires . Autre motif invoqué par nos collègues :distribuer ces heures à des non historiens équivaut pour eux à démanteler la discipline et ouvrir la porte de leur discipline aux non diplômés, non spécialistes, non légitimes… « N’importe qui peut enseigner n’importe quoi. ». Voici en substance ce qui est ressorti de mes échanges avec mes collègues Historiens lorsque j’ai évoqué une possible demande d’enseignement de l’EMC, une fois dépassé le : » ce n’est pas possible « , »les horaires sont indissociables « . De toute évidence,nos collègues craignent des pertes d’heures pour leur enseignement propre ou la disparition de leur discipline en tant que telle et c’est un motif suffisant pour eux pour exercer cette exclusivité. Cordialement.