La grammaire est souvent une matière rébarbative pour les enfants qui se demandent à quoi elle peut bien servir. « Les enseignants ont souvent le sentiment de ne pas maîtriser parfaitement la matière. Ils se raccrochent alors au cadre rassurant, bien défini de la grammaire scolaire, qui propose des exemples proprets, triés sur le volet, et des textes parfois adaptés pour justifier les règles établies », déclare Brigitte Mahillon, professeure de français, qui vient de publier avec France Tillieu, professeure des écoles, « 100 idées pour enseigner la grammaire autrement » aux éditions Tom Pousse. Un ouvrage destiné aux enseignants, orthophonistes ou parents souhaitant accompagner l’enfant de 8 à 14 ans dans sa découverte de la langue.
Le fruit de 30 ans de recherches
Ce livre condense les trente années de recherches, d’expérimentations et de pratiques des auteures. Brigitte Mahillon a été professeure de français dans le secondaire pendant 4 ans avant d’enseigner dans une école primaire. « J’ai dû me former entre autres, aux mathématiques et aux sciences et paradoxalement, c’est dans l’exercice de l’enseignement de la grammaire que je me suis sentie le plus mal à l’aise alors que j’y étais particulièrement formée. Très vite, je me suis aperçue que la grammaire scolaire imposait aux enfants des mécanismes, des règles, des découpages parfois arbitraires », confie l’enseignante. Cette prise de conscience l’incite à changer radicalement d’attitude, à penser différemment et à entamer des recherches.
Décortiquer la langue pour mieux la comprendre
Avec France Tillieu, dans leur ouvrage, elles amènent tous les enfants d’une classe, comme des petits grammairiens, à réfléchir sur le fonctionnement de leur propre langue, à comprendre la grammaire et non à l’apprendre par cœur. Elles les invitent à découvrir les mécanismes de la langue en « manipulant » les phrases et les textes. Les enfants découpent, miment, dessinent, transforment, permutent, effacent, comparent, construisent, déconstruisent. Ils formulent des hypothèses, les vérifient. Ils lisent, rédigent « à la manière de »…
Les séances contenues dans le livre constituent une phase de découverte. Elles doivent ensuite être enrichies par une phase de synthèse, et par beaucoup de pratique avant que le professeur n’enseigne aux enfants la terminologie.
Tentés par cette approche ? Voici quelques extraits à reproduire en classe :
- Travail sur les adjectifs
Prendre un texte neutre. Demander à la moitié de la classe d’ajouter des mots (pas des phrases) pour que le ton devienne amusant. L’autre moitié de la classe doit, au contraire, ajouter des mots pour le rendre triste. Les enfants lisent ensuite leurs textes à voix haute. Ils relient à l’aide d’une flèche les mots, ou groupe de mots, ajoutés à ceux qu’ils complètent. Ils rassemblent les expansions, les classent, les comptent par catégorie. Ils constatent alors que le nom peut être complété par une proposition, un autre nom ou un adjectif. Ces derniers sont les plus nombreux. Les élèves remarquent qu’ils s’accordent en genre et en nombre avec le nom auquel ils se rapportent.
- La voix passive
Demander aux enfants de dessiner sur une feuille A4 la phrase A : « Les chasseurs poursuivent les mammouths ». Puis, sur une autre feuille, la phrase B : « Les mammouths sont poursuivis par les chasseurs ». Ils notent la lettre correspondant au dos de leurs dessins. Réunir les esquisses et les montrer à l’ensemble de la classe. Les élèves doivent deviner à chaque fois s’il s’agit de la phrase A ou B. Leur demander comment ils les ont reconnues, si la situation est la même, si elle se situe au même moment. « Dans la première phrase, les enfants dessinent naturellement les chasseurs sur la majeure partie de leur feuille et un petit bout des mammouths. Dans la seconde, ils font l’inverse. Ils constatent que l’attention est portée soit sur le sujet soit sur celui qui subit l’action, selon la voix utilisée », explique Brigitte Mahillon.
- Les différentes valeurs des déterminants
L’enseignant efface les déterminants d’un texte avant de le lire. Les enfants constatent qu’ils comprennent son sens mais qu’il n’est pas correct. Ils doivent donc remettre les déterminants pour compléter le texte. On compare les différentes versions produites, les nuances apportées par chacune. On lit le texte original pour saisir l’intention de l’auteur à travers les déterminants employés. Les élèves remarquent qu’ils s’accordent avec les noms, qu’ils ont des valeurs diverses (d’appartenance, démonstrative…).
- Le sujet du verbe/ verbe/ complément du verbe
Chaque enfant choisit un verbe d’action et le dessine sur une feuille. Au dos de celle-ci, il écrit la phrase la plus courte possible pour résumer son esquisse. Il entoure le verbe. Chacun montre son dessin. Les autres doivent deviner le verbe choisi. Le professeur demande alors ce que l’enfant a dessiné pour exprimer le verbe. Les petits observateurs constatent que le verbe ne se dessine pas. Que pour l’exprimer, il faut dessiner celui qui fait l’action et le plus souvent sur quoi porte l’action. Ils saisissent ainsi la construction d’une phrase minimale.
- Les pronoms
Ecrire au tableau : « porter des lunettes ». Demander à un enfant de venir devant ses camarades. Lui donner des lunettes et lui demander : « que dis-tu ? ». Il répond « je porte des lunettes ». Un second enfant le rejoint et doit s’adresser à lui : « tu portes des lunettes ». Un troisième doit venir et s’adresser au deuxième en disant : « il porte des lunettes ». Demander ensuite aux enfants lequel des trois n’a pas besoin des deux autres pour énoncer la phrase. Puis, lequel des trois n’a besoin que du premier pour dire sa phrase. Enfin, lequel a besoin des deux autres pour la prononcer.
Les élèves tirent les conclusions sur l’usage de ces pronoms.
Génial je suis à la recherche de ce genre de méthodologie j enseigne l’ italien . Avez vous d autres sources et supports? Très cordialement Isabelle F