Le Grand Festival contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT, organisé la semaine dernière au Palais de la Porte Dorée de Paris, était un événement à vocation pédagogique proposant notamment un Tribunal pour les générations futures. Pouvez-vous nous en parler ?
Le Tribunal pour les générations futures avait pour but, sur le modèle d’un concours d’éloquence, de permettre à des jeunes de s’exprimer sur les thématiques du Festival. La volonté du Palais de la Porte Dorée était d’attirer un public jeune, la future génération, à qui l’on pouvait transmettre les valeurs que l’événement véhicule. D’où aussi l’intérêt pour moi, qui suis humoriste, d’en être la marraine. Même si je leur ai bien dit que je n’étais pas T’choupi !
Dans ce même but pédagogique, j’ai animé une master class pour les jeunes qui voulaient apprendre à écrire des blagues. L’idée était de voir comment aborder des sujets qui peuvent paraître clivants de façon à les rendre drôles. Le but n’était pas former des humoristes, mais de leur montrer que ces méthodes, que nous appliquons sur scène, peuvent être utilisées dans la vie pour détourner ou contourner des choses agressives.
Pourquoi personnellement avez-vous souhaité vous engager dans cette semaine d’éducation ?
Je suis venue jouer l’année dernière en tant qu’artiste, dans le cadre du Festival, et j’avais beaucoup discuté des thématiques avec les organisateurs à ce moment-là. Ils ont donc pensé à moi cette année pour le parrainer.
Au-delà de l’importance de lutter contre le racisme, j’ai aussi accepté pour la symbolique de le faire au Palais de la Porte Dorée. Nous devons nous réapproprier ce bâtiment et je pense que toutes les écoles devraient le visiter.
Le Grand Festival prend place dans la Semaine d’éducation contre le racisme et l’antisémitisme. Selon vous, quel rôle l’Ecole a-t-elle à jouer dans la lutte contre toutes les formes de discriminations ?
Un très grand rôle ! L’école doit être un lieu de diversité, d’échange, de partage et d’acceptation de l’autre. C’est pour moi le lieu où l’on devient quelqu’un, et on le devient non seulement en apprenant son histoire, mais aussi l’histoire des autres. Et parfois, l’Ecole française ne reflète pas tous ses élèves. Mais j’ai conscience que ça ne dépend pas de la volonté des professeurs, les programmes sont faits de façon à créer des personnes opérationnelles pour les startups et les entreprises, on ne cherche pas à créer de jolis êtres sociaux.
L’un des thèmes de débats du Festival est de faire d’Internet un outil de pédagogie contre les discriminations. Comment pourrait-il être utilisé dans les classes par les enseignants ?
Se servir d’Internet, c’est d’abord apprendre à détecter les fausses informations ! Quand j’étais à l’école, mon prof nous apprenait comment lire les informations sur un journal. Je pense qu’aujourd’hui il faut faire la même chose avec Internet.
D’un côté, j’ai un peu la sensation qu’Internet libère le racisme, sachant que c’est encore un média relativement libre. Il existe des algorithmes pour repérer les propos discriminants, racistes ou sexistes, mais ils ne sont pas encore au point, j’en fais d’ailleurs les frais !
Mais d’un autre côté, Internet permet aussi à tout le monde d’être visible, j’ai par exemple l’impression qu’il y a beaucoup plus de Noirs sur Internet qu’à la télévision. Il y a vraiment quelque chose d’intéressant dans cet outil qui permet la création et le partage avec le monde entier. Il permet par exemple de déconstruire les fantasmes de certains sur l’Afrique, et sur ce qu’on peut y trouver.
Aux enseignants de s’emparer des possibilités de cet outil, et d’apprendre aux élèves à déjouer les pièges qu’ils peuvent y rencontrer !
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