(article publié le 3 février mis à jour)
Deux ou trois épreuves d’admissibilité et deux épreuves d’admission, dont un entretien « sur la motivation du candidat et son aptitude à se projeter dans le métier de professeur » : le ministère de l’Education nationale publiait le 25 janvier les modalités d’organisation du nouveau CAPES, très critiqué par les enseignants (voir ici l’exemple des Lettres Classiques et des Lettres Modernes et leur comparaison avec le CAPES actuel).
Une épreuve orale qui « ressemble fortement à un entretien d’embauche »
Ainsi, Thibaut Poirot, agrégé d’histoire, affirme dans une tribune sur le Monde, que cette nouvelle formule « diminue profondément […] l’évaluation des connaissances scientifiques du candidat par rapport aux exercices de pratiques professionnelles ». Dans sa discipline, « la part stricte du ‘disciplinaire’ ne tient plus qu’en une seule épreuve à l’écrit », dénonce-t-il.
La nouvelle épreuve d’admission orale d’entretien avec le jury pose notamment problème. Cette dernière, « passée à l’oral, sans préparation, sans contenu disciplinaire, didactique ou pédagogique, ressemble fortement à un entretien d’embauche », résume la FSU dans un communiqué publié mardi 3 février. Selon l’arrêté du 25 janvier, cet entretien comportera deux parties. La première consistera en une présentation par le candidat des « éléments de son parcours et des expériences qui l’ont conduit à se présenter au concours ». La seconde partie doit permettre au jury d’apprécier « au travers de deux mises en situation professionnelle, […] l’aptitude du candidat à s’approprier les valeurs de la République » et à « faire connaître et faire partager ces valeurs et exigences ».
La FSU déplore que cette dernière épreuve « pèse très lourd dans le concours (coefficient 3 sur 8 pour les oraux), en comparaison de l’évaluation des savoirs à enseigner et des savoirs pour enseigner, et ne peut guère donner lieu qu’à des réponses formatées ».
« L’oral permet de voir si le candidat fait des fautes ou a un mauvais accent »
Il y a quelques mois, Pierre Merle, professeur d’université à l’Institut National Supérieur du Professorat et de l’Education (INSPE) de Bretagne, s’insurgeait déjà contre la réforme du CAPES, en particulier contre la suppression de l’épreuve orale académique. « C’est un recul considérable, notamment pour évaluer les futurs professeurs en langue vivante étrangère, estimait-il. L’oral permet de voir si le candidat fait des fautes grammaticales, lexicales, a des défauts de prononciation, un mauvais accent… » Dans d’autres disciplines, « sciences économiques et sociales par exemple, l’oral permettait de formuler des questions que les élèves risquent de poser au futur professeur ».
Il ne se positionnait pas contre l’épreuve d’entretien avec le jury, mais jugeait que l’évaluation devait être « plus encadrée, par exemple centrées sur les connaissances juridiques, car les questions abordées sont polémiques et le risque d’une évaluation contestable est possible ».
« Cette épreuve est une blague »
Du côté des enseignants, la réforme est très contestée, en particulier sur la baisse de l’évaluation de la maîtrise disciplinaire des candidats.
Pendant que twitter rigole d’un ministre faisant son sport, la formation des enseignants et le concours du CAPES ont été achevés comme un pauvre cheval à la jambe brisée tombé sur le bord du chemin.
— Nicolas Beaupré (@nicolas_beaupre) February 3, 2021
La réforme du Capes est désastreuse et dénoncée – dans le vide – depuis qu’elle a été annoncée, comme ici dans une tribune collective d’https://t.co/3y2zrsa071.s et géographes qui a plus d’un an.
— Débats d’école (@debatdecole1) February 2, 2021
Nous n’avons pas été entendu, personne ne s’en étonne https://t.co/BXyYiXB8rN
Cette réforme est d’autant plus inquiétante qu’elle s’inscrit dans un contexte préexistant de dégradation de la maîtrise disciplinaire des jeunes profs. Et le silence de la profession est malgré tout assourdissant.
— osvaldo (@_osvie) February 1, 2021
Cela m’inquiète et cela m’effraie.
Réforme du Capes : ça ne sera pas moins de compétences disciplinaires mais………………
— Flamand rosse (en deuil) (@flamross) February 1, 2021
…….. ben si, en fait…
Ils veulent éviter que les membres du jury aient à discuter avec des candidats qui parlent mieux la langue étrangère qu’eux ?
— Immunisé COVID — auto dispensé de masque (@CyniqueDeGauche) January 31, 2021
Sans rire, cette épreuve est une blague qui permettra de donner le CAPES à des gens sans le bagage disciplinaire nécessaire pour enseigner.
En lettres, est supprimée l’épreuve qui évalue le cœur et le sens du métier : l’explication de textes, lecture experte, qu’il pratique et transmet. Tout part de là et tout y ramène, et aucun entretien artificiel ne fera illusion.
— Nathalie Cros (@nathalie_cros) January 31, 2021
Comment l’inspection peut-elle accepter la réforme du #CAPES sans mot dire ?
— Un quidam 🍓🐇 (@profdhistgeo) February 1, 2021
Seront mis devant les élèves non plus des maîtres de leur discipline au sens noble du terme mais des ersatz d’animateurs qui ont excellé pour obtenir une sorte de BAFA post bac #enseignants
Sa perversité est également de rejouer la concurrence entre disciplinaire et pédagogie, comme si l’une devait être subordonnée à l’autre, comme si l’une était possible sans l’autre… Que l’on ne se méprenne pas, aucun pédagogue sérieux ne peux applaudir cette réforme du Capes
— Débats d’école (@debatdecole1) February 2, 2021
Cependant, certains estiment qu’être un « expert dans sa discipline » n’est pas forcément nécessaire pour enseigner dans le second degré :
Personnellement j’ai toujours considéré que le capes ne servait pas à grand chose. Être un « expert » de la discipline, pour quoi faire ? Enseigner en collège ? Quelle utilité ?
— Histoire(s) de prof (@Histoire_2_prof) February 2, 2021
Quoi qu’il en soit, cette réforme entrera bien en vigueur pour la session 2022. Le ministère vient de publier des sujets zéro du CAPES : « afin d’aider les candidats dans leur préparation, les sujets zéro des épreuves donnent des exemples de ce qui sera attendu à partir de la session 2022. »
Contente de ne plus faire partie de cette famille qui n’en a rien à faire de ses petits et qui va les laisser dans les mains d’incompétents!
« En même temps », vu qu’on sera morts (les retraités de l’En) ça gênera qui ? Le niveau est tellement nivelé par le bas …