Eddy Khaldi, président des Délégués Départementaux de l’Éducation Nationale (DDEN), livre son analyse sur l’enseignement immersif figurant dans la loi Molac promulguée le 21 mai, censuré par le Conseil Constitutionnel.
Pour le bilinguisme contre le séparatisme
Le Conseil constitutionnel dans une décision du 21 mai 2021, en rappelant que la langue de la République est le français, valide des dispositions – de la loi dite « Paul Molac », député breton – relatives à la prise en charge financière par les communes de la scolarisation d’enfants suivant des enseignements de langue régionale mais censure celles relatives à l’« enseignement immersif » de ces langues et à l’utilisation de signes diacritiques dans les actes de l’état civil.
Ce recours contre la « loi Molac » devant le Conseil constitutionnel a été déposé par 61 députés de la même majorité parlementaire qui l’avait votée. S’agit-il, pour ces partisans de l’immersion, avec le rejet du français langue d’enseignement, de transformer les langues régionales en un vecteur de stratégie identitaire fabriquée ou de participer à une nouvelle manoeuvre préélectorale à la veille des élections départementales et régionales ?
Pour nous DDEN, la pratique des langues régionales dans le bilinguisme à parité horaire gérée, encadrée et suivie par le service public doit continuer à trouver sa juste place en son sein. Mais, cette pratique ne peut en aucun cas justifier la mise en réseau d’établissements concédés à des structures privées communautaristes pour un financement sur subsides publics. L’apprentissage des langues doit réunir et non diviser. Cette question importante nécessite patience et explications à long terme pour rappeler les principes constitutionnels et pour distinguer les dangers et risques de l’exclusivité de l’immersion contraire aux objectifs du nécessaire bilinguisme à parité horaire que nous revendiquons.
L’enseignement par « immersion » fait du français une langue « étrangère ». Les DDEN, en 2001 avec les quatre autres organisations du CNAL et en 2002 avec trois des composantes (FCPE, SE-UNSA et UNSA Education, sans la Ligue de l’Enseignement), avaient saisi, avec succès, à deux reprises, le Conseil d’Etat lors des propositions aventureuses et sans concertation du ministre Jack Lang. De fait ces tentatives d’intégration directe dans le service public des écoles privées linguistiques Diwan furent jugées illégales. L’enseignement de toutes les matières exclusivement dispensé dans la langue régionale est juridiquement contraire aux principes constitutionnels et aux règles de fonctionnement du service public d’éducation et contribue à le dénaturer.
Ces décisions du Conseil d’Etat furent aussi confortées par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 27 décembre 2001 qui rappelait, déjà, que la langue de la République est le français. Les DDEN ont toujours défendu l’enseignement du bilinguisme dans le service public sans pour autant faire supporter à l’école publique des revendications politiques séparatistes sous-jacentes de l’immersion. Les DDEN revendiquent une école publique laïque, ouverte à toutes et tous qui reconnaît le droit à la différence et la diversité culturelle sans pour autant institutionnaliser et financer la différence des droits et la non mixité sociale porteuse de ségrégation.
Eddy Khaldi 28 mai 2021
Séparatisme ? non mixité sociale ? Ségrégation ?
Permettez-moi de citer la Charte de Diwan (puisqu’il s’agit bien de ce type d’enseignement sous contrat qui est visé) :
« 1. L’association Diwan est ouverte à toutes les familles désirant assurer une éducation de leurs enfants en langue bretonne, sans distinction socio-professionnelle, philosophique ou politique. Les écoles sont gratuites et ouvertes à tous. »
« 3. Diwan est indépendant par rapport à toute formation philosophique, confessionnelle, politique, syndicale, etc. En conséquence, Diwan affirme que son combat exige que soient respectées les convictions religieuses, philosophiques ou politiques de tous ses membres, quel que soit l’éventail de celles-ci et tant qu’elles ne sont pas contraires à la Déclaration Universelle des Droits de l’homme. Cette indispensable tolérance conduit Diwan à défendre la laïcité dans son enseignement et à se porter garant de la liberté de pensée de chaque personne. »
https://www.diwan.bzh/fr/la-charte-de-1977