
Pouvez-vous vous présenter ?
Je suis professeur des écoles. J’ai travaillé plusieurs années dans l’enseignement spécialisé avant d’être enseignant référent à l’usage du numérique. J’ai ensuite rejoint Réseau Canopé en tant que formateur puis directeur d’atelier et depuis trois ans je suis coordinateur pour la direction territoriale de Bourgogne Franche-Comté pour le numérique éducatif et l’innovation. Depuis deux ans, je suis également coordinateur avec deux collègues d’un groupe de travail dédié aux humanités numériques à Réseau Canopé dans lequel nous travaillons, entre autres, sur la thématique des IA génératives dans l’éducation.
Comment est né votre projet « une IA par jour » ?
C’est né justement de cette thématique traitée en interne à Réseau Canopé. Nous avons vu arriver la version grand public de ChatGPT fin 2022 et avons tout de suite pensé qu’il y aurait des répercussions dans l’éducation. Nous avons rapidement fait de la veille et proposé des formations sur le sujet. Dans le cadre de cette veille, je me suis intéressé à tous les outils d’IA générative qui sont arrivés très rapidement par dizaines, centaines. Cette veille au départ était interne à notre groupe, puis d’autres collègues ont été intéressés. Très vite, la demande s’est élargie et j’ai publié sur les réseaux. J’en ai fait un premier site puis un deuxième en novembre 2023 : www.uneiaparjour.fr
Concrètement que proposez-vous ?
Je propose chaque jour un outil d’intelligence artificielle générative que j’ai testé. Il existe des dizaines de catalogues d’outils mais mon objectif est de faire un choix des outils que je publie, et de me limiter à un par jour. Je ne publie que des outils gratuits ou freemium qui permettent l’expérimentation sans publicité et mes publications sont datées du jour. Ces outils peuvent changer de version du jour au lendemain, de modèle économique, voire disparaître. J’essaye d’ailleurs d’archiver ceux qui ont déjà disparu.
Êtes-vous seul à travailler sur le site ?
Je suis tout seul mais de plus en plus, et c’est ce qui est chouette, des gens suivent le projet et m’informent d’outils qu’ils ont repérés. Depuis deux ans, j’ai des sources de veille organisée et j’ai ainsi toute une liste d’outils qui peuvent être intéressants à exploiter. Et puis, je vais peut-être casser un mythe, mais je ne publie pas tous les jours, il y a aussi des posts programmés généralement à la semaine. C’est ce qui me permet de gérer ça tout seul.
Vous êtes dans une logique de partage…
Oui, j’aime bien découvrir des outils et expérimenter. Si d’autres sont intéressés, autant que ça leur serve aussi. La base des articles du site présentant les outils et ma sélection sont d’ailleurs en creative commons, tout le monde peut les réutiliser. Dans l’éducation et plus largement dans la société, nous sommes en position d’explorateur de cet environnement numérique. S’il y a déjà des pistes de sélection, autant en profiter.
Vous en êtes à plus de 740 outils déjà présentés. Est-ce qu’au bout d’un moment ça ne stagne pas un peu ?
Non ça ne s’arrête jamais. Il y a des dizaines de nouveaux outils d’intelligence artificielle générative chaque jour. Tous ces outils sont basés sur des modèles de langage ou d’image qui évoluent et donc les outils aussi. Ceux utilisés pour faire des flashcards ou des quiz, utilisent potentiellement ChatGPT, Mistral, Claude ou Gemini… S’ils évoluent, d’autres fonctionnalités et outils peuvent apparaître. C’est un marché plein d’opportunités pour les entreprises. C’est aussi peut-être la première fois que l’open source est au niveau des produits complètement propriétaires, ça ouvre un nouveau champ de possibles. Même certaines entreprises mettent leur modèle en open source ce qui permet à ceux qui en ont les compétences de développer de nouveaux outils.
Quelle est jusqu’à maintenant la découverte en lien avec l’IA qui vous a le plus étonné ?
Il y en a plusieurs. La sélection que je présente sur mon site est très subjective. On ne rentre pas par l’outil, même si je fais « une IA par jour », pour moi l’outil n’arrive qu’à la fin du process. La première chose, c’est de partir de son besoin défini en amont, puis la méthodologie (comment je m’adresse à la machine, le prompt). Après vient le choix de l’outil : est-ce qu’il correspond à mes valeurs personnelles, professionnelles, est-ce qu’il rentre dans le cadre réglementaire… et ensuite je trouverai l’outil. Pour ma part, j’utilise plusieurs modèles de langage en fonction des demandes, des besoins. Par exemple, pour la modélisation d’idées j’utilise davantage Claude ; pour quelque chose de plus littéraire peut-être plus ChatGPT, pour quelque chose d’ancré dans le réel peut-être Mistral. Si c’est de l’analyse de document, j’utiliserai NotebookLM. Mais on n’a pas forcément besoin de recourir aux IA génératives pour tout. Si j’ai besoin d’une image par exemple, est-ce qu’elle n’existe pas déjà des dizaines de fois dans une banque d’images libre et gratuite ? Ai-je besoin d’en générer une nouvelle ? Mais si j’ai besoin d’une image hyper contextualisée, là peut-être que ce sera pertinent.
Quel message adresseriez-vous aux enseignants ?
Il faut encourager cette envie de découvrir pour savoir au moins de quoi on parle. Les IA génératives ne sont qu’une petite partie des intelligences artificielles. Elles sont un objet d’étude scientifique depuis 70 ans et dans nos vies, elles sont présentes au quotidien : sur les plateformes de streaming, le GPS… Comprendre comment ça marche, que les IA génératives proposent des réponses vraisemblables basées sur la probabilité, ça permet d’avoir l’esprit critique nécessaire. Il n’y a pas d’obligation à utiliser ces outils, mais à comprendre leurs bases de fonctionnement.
Ensuite, ce qui importe c’est l’expérimentation. Vitta Science, par exemple, est intéressant à tester car il propose une interface d’IA générative de texte et d’image. Le site ComparIA, développé par le ministère de la culture et la direction pour le numérique, permet à partir d’un prompt de voir les réponses que peuvent apporter les différents modèles de langage. Selon notre demande, tel ou tel modèle sera plus approprié. Certains modèles ont parfois moins de données dans leur base que ChatGPT ou Gemini mais sont hyper spécialisés sur un sujet et apporteront une meilleure réponse. Pour se former, il y a un Mooc européen qui s’appelle « Intelligence artificielle pour et par les enseignants » sur Fun Mooc. Sans oublier toutes les formations proposées par Réseau Canopé ou les académies.
Quels sont vos autres projets en cours ?
Dans le cadre professionnel, à Réseau Canopé, on continue une veille poussée sur ces sujets et à proposer des formations en ligne sur CanoTech et en présence dans nos ateliers, à produire des ressources pour tous (vidéos, infographie…) disponibles sur notre page dédiée. On parcourt le territoire car la demande est très grande pour tous les acteurs de la formation dans l’éducation.
Nous travaillons également à une deuxième version de notre étude « Représentation REPIA », qui s’intéresse aux représentations de l’IA par les adolescents.
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